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Qui va gagner la guerre des petites annonces au Maroc ?

Qui va gagner la guerre des petites annonces au Maroc ?

« La concurrence, c’est du jamais vu au Maroc » m'annonce d'emblée Tajdine Filali, le fondateur de Marocannonces à propos du marché des petites annonces au Maroc. 

Il y a quelques temps, on pouvait compter plus de 250 sites de petites annonces au Maroc, de tailles et qualités variées, mais aujourd’hui l’attention se concentre sur une histoire à la David et Goliath. En guise d’irréductible gaulois, Marocannonces, un site lancé par un marocain en 2000 et qui n’a fait appel à aucun financement extérieur en 13 ans.                                                                                 

Face à lui, deux envahisseurs : Avito, un groupe lancé en 2007 par deux entrepreneurs suédois et maintenant leader du marché en Russie et Bikhir du groupe norvégien Schibsted Group, le leader des petites annonces en Europe qui compte dans ses rangs LeBonCoin.fr en France, Blocket.se en Espagne, subito.it en Italie, segundamano.es en Suède et bien d’autres.

Les deux sites se sont maintenant imposés sur le marché marocain. Avito.ma est le leader avec 3,2 millions de visiteurs uniques par mois et 16 milliards de MAD de transactions estimées pour 2014 (2,11 milliards de USD), ce qui représentera 2% du PIB marocain en 2014. Le site parvient même à être le deuxième site le plus visité par les marocains, 10 mois seulement après son lancement en juillet 2012. Bikhir quant à lui annonce valider 5 000 annonces par jour.

Malgré une concurrence acharnée, Tajdine Filali garde le sourire, le nombre d’annonces publiées reste inchangé : 3 000 par jour.

Le marché devrait continuer à grossir avec l’arrivée sur internet de 61% des foyers marocains qui n’ont pas accès à internet à l’heure actuelle.

Les trois sites ont au moins une chose en commun : ils sont prêt à mettre du temps et de l’argent pour devenir n°1. « Ce n’est pas un sprint, mais un marathon. C’est une longue bataille, explique Larbi Alaoui Belrhiti, general manager de Bikhir. » 

Des services de qualité pour les marocains par des marocains ?

« Nous vendons de tous, des chameaux aux voitures, rigole Sammy Ben Abla, le directeur du marketing d’Avito. » Les trois sites offrent un service gratuit similaire permettant aux marocains souhaitant acheter ou vendre tout ce qui est possible et imaginable (et légal) de se rencontrer.

Les trois sites partagent la même envie d’être perçu comme un service local près des gens. Facile pour MarocAnnonces qui est présent sur le marché depuis 13 ans et n’a jamais reçu de fonds extérieur. Moins évident pour Avito et Bikhir ; et pourtant les managers estiment avoir atteint leur objectif grâce à leur équipe 100% marocaine. Les deux sites se font discrets sur leurs origines internationales.

Chaque plateforme a sa propre formule pour assurer la qualité du service. L’équipe d’Avito est disponible 24h/24 et 7j/7 pour vérifier les annonces. Larbi Alaoui Belrhiti annonce fièrement que son équipe de validation des annonces de 15 personnes est très stricte sur les transactions illégales et les fraudes.

Pour Tajdine Filali de MarocAnnonces, c’est 13 ans de connaissances du marché et sa «  cuisine secrète » qui font la différence.

Grâce à ces efforts, les marocains font de plus en plus confiance à ce genre de plateformes, il s’agit maintenant pour ces trois acteurs de réussir à se différencier.

La force d’un nom vs le pouvoir du marketing

Chez Avito.ma et Bikhir, on croit deux que la seule façon de maintenir leur croissance est d’éduquer les marocains en faisant jouer leur budget marketing.

Avito.ma et Bikhir sont chacun soutenus par un site mère profitable prêt à investir massivement pour rafler le plus de parts de marché possible. Avito.ma a ainsi été le premier site web marocain à lancer une campagne de pub télé. Récemment, ils ont noué un partenariat avec Haja El Hamdaouia, une chanteuse marocain très populaire. Larbi Alaoui Beirhiti de Bikhir ne cache pas avoir des ambitions similaires : « Les campagnes mass-média comme la télévision, la radio seraient à venir. »

Bikhir utilise le reste de son large budget pour se développer sur le mobile, alors qu’Avito.ma joue sur les partenariats, dont un avec Voituresmaroc, le n°1 des petites annonces automobiles avant l’arrivée d’Avito.ma et Bikhir.

MarocAnnonces n’a pas les mêmes moyens que ces deux principaux concurrents mais Tajdine Filali est confiant que son nom et le bouche-à-oreille seront suffisant : « Aujourd’hui, tout le monde connaît Maroc Annonces, le nom parle de lui-même. » Le site propose aussi une interface différente et très complète proposant du covoiturage, une rubrique perdu de vue, des services pratiques comme les horaires de la prière ou encore l’option échange/troc. Pourtant, si le gâteau a grossi, le nombre de transactions enregistré sur le site demeure stable. Tajdine Filali s’en félicite, mais est-ce vraiment une stratégie viable à long terme ? 

Doit-on s’attendre à des fusions et acquisitions ?

Avito.ma et Bikhir ne sont pas pressés de devenir rentable. Chez Avito.ma, Sammy Ben Abla ne s’en cache pas : «  Le plus important pour nous, c’est de continuer à investir et de nous assure que le marché atteigne sa maturité. Une fois que nous serons là, nous commencerons à penser à devenir rentable. »

Est-ce que les plus petits sites comme MarocAnnonces qui ne peuvent pas se permettre des campagnes aussi agressives pourront survivre ?

En mars dernier, une rumeur annonçait le rachat de MarocAnnonces pour 15 millions de MAD, soit près de 1,7 million de dollars, par Avito.ma avant d’être démenti par le groupe. « Nous ne sommes pas, pour l’instant, intéressés par l’idée d’acquérir un de nos concurrents, nous a confié Sammy Ben Abla. Cet accord n’a jamais été sur la table et ne se fera pas pour l’instant. » Tajdine Filali de Marocannonces semble toutefois considérer toutes les options, avouant qu’il aurait déjà reçu des offres et considère une levée de fonds. 

Le marché est loin de se stabiliser. Souqaffaires.ma, un site local, serait en train de lever des fonds, et le site régional Dubizzle, basé à Dubaï, a tenté d’entrer sur le marché mais a « décidé de ne pas continuer, stoppant toutes [ses] activités il y a à peu près un an » a confié J.C. Butler, un des co-fondateurs.

Les deux acteurs majeurs, Avito et Schibsted Group, avouent que leur objectif final est de se développer en Afrique. Avito s’est déjà lancé en Egypte sous le nom de Bekam en décembre 2012 et doit affronter une forte concurrence notamment de la part de Dubizzle. Quant aux autres pays, « on verra » me répond Ben Abla. Le norvégien Schibsted Group a lui déjà sauté le pas en lançant des sites en bêta en Algérie, Tunisie, Egypte et au Nigéria.

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